En avril 1940, Paul Éluard, poète, rend visite à Salvador Dali. Le peintre et son épouse Gala vivent à Arcachon à la villa Salesse.

Gala fut la première femme d’Éluard, ils se sont séparés en 1928. La guerre a commencé depuis un an et les interrogations restent nombreuses. En cette période si incertaine, ces artistes peinent à créer, alors ils cherchent de nouvelles expérimentations.

Lors d’une de leur promenade matinale le long de la plage, le poète et le peintre inventent une espèce de jeu. Ils ont tous les deux participé au mouvement surréaliste et exploré l’écriture automatique, la déconstruction du langage et des formes. Ils échafaudent un dispositif créatif collectif qu’ils nomment l’éphéméride à la mer.

Ainsi, chaque soir, ils proposent à leurs invités, de participer à la conception d’un cadavre exquis : chacun écrit une phrase, cache son texte et passe la feuille à son voisin qui écrit quelques mots. Et ainsi de suite… Le texte est rédigé, mais personne ne le lit, car il sera jeté à la mer !

Les compères demandent à un verrier de créer un contenant en forme de poisson avec une fermeture hermétique. La page écrite est glissée dans ce poisson, soigneusement fermé et lors de leur randonnée quotidienne, Dali et Éluard lancent l’objet à la mer.

Cette anecdote est racontée dans des biographies, mais jusqu’à ce jour, rien ne venait en confirmer la réalité. Or, un plongeur a remonté d’une exploration sous-marine près du « trou St-Yves », un objet de verre toujours scellé. Ce plongeur, fort scrupuleux, a remis à un laboratoire sa trouvaille. Après analyse, il semble être un de ces poissons poétiques, la date est attestée et quelques phrases ont été dévoilées :

1er avril 1940
Vole le sens au son
Ne bois pas d’eau
Le poisson nait d’une épine
Os croisés, mots croisés
Voyager à dos de méduse
Forme tes yeux en les fermant
Écris l’impérissable sur le sable

Article (fictif – 1er avril) de Isabelle Antonutti, Société Historique et Archéologique d’Arcachon et du Pays de Buch