En cette journée mondiale de l’alimentation : zoom sur le projet alimentaire de territoire du Bassin d’Arcachon
Le Bassin d’Arcachon et le Val de l’Eyre (Pays BARVAL) se mobilisent autour d’un Projet Alimentaire de Territoire (PAT). Dans un contexte de baisse du nombre d’exploitations agricoles et de forte attente des habitants pour une alimentation locale, biologique et de qualité, ce PAT vise à repenser les modes de production, de distribution et de consommation. Objectif : tendre vers plus de résilience et d’autonomie alimentaire, tout en redonnant du sens au métier d’agriculteur.
Un territoire attractif, mais fragilisé par le foncier
Aujourd’hui, on compte 70 exploitations agricoles recensées sur le Bassin d’Arcachon et le Val de l’Eyre, contre bien plus il y a vingt ans. Entre 2010 et 2020, le territoire a perdu 57% de ses exploitations : une tendance qui rejoint le déclin national. Si toutes les productions du territoire étaient redirigées pour une consommation locale, seule 14% des besoins du territoire seraient couverts.

Et dans le même temps, la demande locale explose : consommateurs, restaurateurs et cantines recherchent des produits de proximité, identifiables et respectueux de l’environnement.
« Nous avons la chance d’être sur un territoire où la population est en demande et a les moyens de payer une alimentation de qualité. Cela attire beaucoup de porteurs de projet », se réjouit Héloise Gaget, animatrice du Pat pour le Pays Barval.
Le principal frein reste le foncier, soumis à une forte spéculation et à la rétention autant qu’aux restrictions liées à la loi littorale « Il faut que les municipalités sacralisent le foncier et s’emparent de cette problématique », souligne l’équipe du PAT, qui accompagne les élus dans l’intégration de ces enjeux dans leurs politiques locales. On constate une concurrence dans l’usage du foncier entre le tissu urbain, les zones forestières et celles dédiées au pâturage équestre.
Autre frein, les sols sableux et pauvres qui requièrent une haute technicité dans la maîtrise de l’irrigation et de l’amendement. Et enfin l’absence d’unité de première transformation (moulin, abattoir, laiterie…)
Lever les freins, identifier les leviers pour le développement de l’agriculture et créer des espaces de rencontres et de dialogues entre intervenants sont les missions du PAT qui s’articulent autour de 3 axes:
- Installation et transmission : faciliter l’arrivée de jeunes agriculteurs et sécuriser les reprises d’exploitations.
- Vente directe : un modèle plébiscité car plus rentable, même s’il demande de solides compétences en gestion, communication et logistique.
- Transformation et restauration collective : création de débouchés via les cantines scolaires et les coopérations avec la restauration.
En trois ans, le PAT a accompagné 45 porteurs de projets, dont 6 installations réussies.
D’une carrière dans l’armée à l’agriculture bio
À La Teste de Buch, La Pépinière La Verdure Bio illustre ce renouveau. Son repreneur, Tanguy Robineau, ancien mécanicien aéronautique et militaire, raconte:
« J’étais client de la pépinière et je me suis lié d’amitié avec son propriétaire. Après un an de bénévolat à ses côtés, je me suis lancé pour reprendre l’exploitation. J’ai tout investi. Je quitte la sécurité financière de l’armée. Mais travailler avec le vivant, en bio, et offrir aux habitants une alimentation saine, c’est vraiment motivant, même si c’est un pari risqué. »
Comme lui, beaucoup des nouveaux installés sur le territoire sont en reconversion.
À Saint-Magne, les Jardins d’Hazera sont portés par Justine, ancienne hôtesse de vente, et Yohan, cuisinier. Ensemble, ils cultivent des légumes anciens et veulent développer un élevage de poules pondeuses et volailles de chair.
« On voulait se rapprocher de la nature. Ici, on fait tout de A à Z, de la graine à l’assiette. La vente directe et les partenariats avec les commerçants locaux nous permettent d’ancrer notre projet dans le territoire. » Leur exploitation installée sur un éco-lieu bénéficie aussi de la proximité d’un camping pour lequel ils entendent proposer des repas, faisant ainsi le lien avec leur expérience professionnelle passée.
Pour Héloise, c’est la grande force de ses nouveaux maraichers, qui viennent avec une vision très moderne de l’agriculture et des idées nouvelles pour travailler et commercialiser autrement.


Une agriculture moderne et des modèles économiques innovants
À Lanton, le Potager de Martine fonctionne depuis 2017. Cette exploitation bio familiale regroupe désormais les enfants de Martine, anciens développeur web et cuisinier qui apprécient la vie au grand air et l’absence de patron. Cette nouvelle génération veut travailler sans être esclave de l’exploitation. Ses fils se sont regroupés à plusieurs associés, ce qui leur permet de prendre des week-ends et des vacances. Ils ont également diversifié les activités, avec des gites et une pension équine pour sécuriser les revenus de la ferme.
« L’agriculture de proximité permet de travailler autrement, en collectif et avec du sens«
Cette recherche de sens et de collectif est parfaitement illustrée avec le développement des Amap. Les associations pour le maintient de l’agriculture paysanne sont au nombre de 7 sur le territoire. Et preuve s’il en faut de l’engouement des consommateurs, toutes sont désormais sur liste d’attente.
Comment ça marche ? Un collectif de consommateurs s’engagent à acheter chaque semaine un panier à un (ou plusieurs) producteur(s), quelle que soit la saison ou le rendement. La démarche assure un revenu régulier au producteur. Une aide ponctuelle peut également être demandé pour certaines récoltes, désherbage etc…
« C’est un vrai engagement de la part du consommateur. C’est penser l’alimentation autrement et pas seulement comme un objet de consommation comme un autre » analyse Héloise Gaget du PAT.
Sensibiliser la grand public aux enjeux de l’alimentation durable et locale
Repenser l’alimentation comme un besoin primaire et essentiel, c’est aussi l’enjeu du projet alimentaire de territoire qui multiplie les opérations de sensibilisation auprès du grand public. « L’alimentation était autrefois un des premiers postes de dépenses, aujourd’hui on privilégie les loisirs ». Revenir à des priorités, c’est tout l’enjeu de la journée organisée le 4 octobre dernier. La fête du Pat a attiré près de 400 visiteurs lors d’un marché des producteurs locaux à Biganos.

Reste qu’à 30 euros, en moyenne, le panier par semaine en Amap, la solution n’est pas accessible à tous les portefeuilles sur un territoire qui, derrière la carte postale, cache une précarité alimentaire bien réelle. 8,6% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Pour ces personnes, le Pat développe des passerelles entre producteurs et CCAS, épiceries solidaires, cantines et associations, afin que chacun ait accès à une alimentation saine et de qualité.
Pour en savoir plus sur le Pat, rendez-vous sur ce lien
Retrouvez toute l’actualité du Bassin d’Arcachon sur ce lien



