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Après 127 jours et 6h en mer, J-J Savin a quitté son tonneau: pari réussi !

Après 127 jours passés en mer pour traverser l’atlantique dans un tonneau à la seul force des vents et des courants, Jean-Jacques Savin a finalement pu être récupéré par un tanker jeudi 2 mai. Son arrivée sur la terre ferme est prévue pour dimanche matin à St Eustache (arrivée vers 1h du matin dans la nuit de samedi à dimanche).

C’est aussi la fin de plusieurs mois de solitude et d’une semaine de tractation pour trouver un navire apte à le ramener sur la terre ferme.

Le récit de ses derniers instants sur le tonneau en intégralité (ci-dessous)  -Tout son carnet de bord sur ce lien

« Enfin me voici au bout de cette aventure, je pense qu’il me faudra attendre plusieurs jours pour réaliser…
Ces 5 derniers jours furent un cauchemar, où j’ai touché les abîmes de notre administration… Je ne plongeai plus dans cette grande bleue mais dans un labyrinthe de tractations avec des mails de 3 pages… Et moi après avoir joué au Ping Pong avec Eole, là ce fut Rolland Garros.
Il a suffi qu’avant de péter les plombs, j’envoie un courrier aux Gardes côtes Américains qui me surveillent pour que quelques heures après j’avais le choix entre 3 Navires…
L’affaire est close, merci les Américains, les autres peuvent ricaner à surfer sur des claviers…

Ma grande surprise fut dans la nuit, ce Cargo qui tourne autour de nous, tout le monde flash et puis doucement s’approche, je ne comprends pas leur anglais, tout l’équipage est là : 20 personnes ! Je demande s’il m’est possible d’avoir du chocolat et la réponse est : Oui, attache le cordage.
Ok j’exécute… Et là, le Tonneau se soulève et percute la paroi de Goliath (il est endommagé…) Heureusement que j’ai un couteau fixé sur le toit, le point de fixation est sur la main courante à l’avant, il ne tiendra pas…
Le Tonneau prend une position verticale sans hésiter je tranche le chanvre de 5 cm de diamètre et nous replongeons…
10 mètres au-dessus de ma tête, ce sont des cris, je ne comprends rien, j’en reste au chocolat.
Nous reprenons notre chevauchée qu’on est bien sur les flots…
J’apprendrai au matin qu’ils avaient eu la gentillesse d’accepter de nous ramener à Rotterdam…

Ça souffle très fort nous avançons à 2,2 nœuds soit 4 km/h, les surfs s’enchaînent. Mon Ami Pierre qui coordonne depuis Paris, ma récupération m’annonce que ce soir le Tanker sera sur zone à 22 heures. UTC. =. 24 H France !
Préparation de quelques affaires pour le débarquement, la journée est tranquille.
Je savoure ces derniers moments et regarde ces 2 compagnons qui depuis 10 jours sont sous notre protection…
C’est au moment où je passe à table pour déguster un filet cuit de la coryphène harponnée la veille que j’entends un bruit de moteur et de par le hublot, avec 2 heures d’avance : Il est là, magnifique, sa coque orange se confond avec le ciel de soleil déclinant….
Mais quel monstre, là-bas tout en haut ça s’agite j’aperçois le Bras de la grue qui pivote, déjà ça me rassure, ce n’est pas une treille où le tonneau aurait râpé tout le long de la coque…
On m’envoie une aussière (cordage) que je fixe les amarres qui sont prêtent. J’attends le crochet, la coque est à 3 mètres, nous montons et descendons sur les vagues qui courent le long de l’acier.
C’est alors que l’amarre arrière qui est autour de la quille (sur les conseils de Lucien) s’est libéré. Évidemment au-dessus personne ne comprend lorsque je demande d’être libérer et qu’il faut que je repositionne ce point de levage sous-marin…
Je plonge, mes 2 compagnons arrivent aussitôt, non il n y’a pas de cadeau de départ…
L’amarre est replacée avec une « ficelle à cassée sous traction » car il y a la plateforme et les barreaux de l’échelle qui gênent et tout le poids est dans cette quille, enfin je remonte !
Nous avons dérivé, nous sommes à l’arrière du tanker.

Nous étions sur tribord, nous passons sur bâbord…
Ok nous recommençons la manipulation, la grue pivote, les crochets descendent et nous comme un yoyo le long de la coque, le crochet à 1 mètre et me donne des frayeurs : il est énorme !
Si nous sommes en-dessous au moment où une vague nous soulève, c’est la bulle ou un panneau solaire ou les deux qui éclatent, tout se passe rapidement et correctement, les amarres se tendent, nous nous élevons dans les airs ; une sensation me prend de retourner une dernière fois dans la grande bleue et dire au revoir à ces 2 innocents qui n’ont rien compris…
Et pour mon grand plaisir, je me laisse décrocher pour une seconde où n’appartiens plus qu’à l’air et puis me revoici dans le ventre de ma mère, retour à l’état fétus…

A la surface, mon compagnon se balance sous les rafales de vents il est bien en équilibre, là-haut à 15 mètres, ce n’est même pas une coquille de noix mais une noisette…
Une bouée arrive, le navire avance doucement, une échelle de corde est déployée trop courte de 1 mètre, profitant d’une vague, j’arrive à l’attraper et doucement remonte, adieu eau salée, tu m’as beaucoup apporté…
Les premiers pas furent difficiles, une impression d’être plus que saoul, torse nu en short, 2 hommes de chaque côté me soutiennent et m’aident à gravir les 5 étages pour rejoindre le Capitaine à la passerelle.
Ce fut la douche chaude savonneuse, depuis 127 jours, une combinaison fluo et puis on me propose un repas à mon souhait, je demande si possible 2 œufs au plat…
Toujours accompagné, nous allons visiter mon compagnon très bien fixé …il se repose, nous nous reposons…
Arrivée Dimanche à S- Eustache à 01 h du matin !
Tant que nous ne sommes pas en Martinique, je me ferai un plaisir de continuer à vous donner des nouvelles de cet odyssée !
Je vous remercie et je vais finir de me consacrer à mon livre dont nous recherchons un titre : Aidez-moi !!
Je ne pensai pas en janvier 2018 que mon rêve susciterait tant de curiosités…
Vos messages m’ont apporté beaucoup d’émotions et je vous embrasse toutes et tous !!!

Jean-Jacques SAVIN. »